jeudi 18 mars 2010

Pénurie de chirurgiens, le Québec ne les embauche pas...


Des spécialistes au chômage

http://www.radio-canada.ca/nouvelles/societe/2010/03/17/001-chirurgien-chomage.shtml
Mise à jour le mercredi 17 mars 2010 
D'après un reportage de Caroline Jarry

Alors que les listes de malades en attente d'une opération s'allongent, trois jeunes chirurgiens cardiaques qui ont terminé leurs études et leur surspécialité ne trouvent pas de poste au Québec.
Salle d'opération
Le président de la Fédération des médecins résidents du Québec demande à Québec de corriger la situation.
« On a des candidats qui ont été formés dans nos programmes de résidence pendant six ans en chirurgie cardiaque, ensuite qui sont allés se surspécialiser à l'extérieur du Québec pour deux ans, et là, on leur dit : ''écoute mon grand, nous n'avons pas de poste à t'offrir parce que nous n'avons pas de disponibilité opératoire pour toi''. C'est tout à fait inadmissible », dénonce Yann Dazé.
Le Dr Dazé explique que le temps opératoire a diminué dans les hôpitaux, en raison de la pénurie d'infirmières et du manque de lits en soins intensifs.
Le responsable des affaires médicales au ministère de la Santé, Michel Bureau, reconnaît la réalité de cette situation : « Bon nombre de chirurgiens au Québec veulent plus de temps pour opérer leurs patients. Certains n'ont pas besoin d'autres collègues, mais ont surtout besoin de plus de temps dans la salle d'opération. »
Mais le Dr Bureau affirme que l'on a fait le plein de médecins dans certaines spécialités, et que l'on n'a pas besoin de nouveaux médecins en chirurgie cardiaque et en radio-oncologie, notamment : « Cela va vous surprendre, mais il y a suffisamment de médecins spécialistes pour donner les services à la population du Québec. On ne manque pas de spécialistes dans tous les domaines. »
Le Dr Bureau affirme qu'on ne rationne pas l'offre de services médicaux. Il convient cependant que les hôpitaux et le ministère devraient mieux informer les résidents des besoins réels pour les spécialités de pointe avant de les envoyer se spécialiser à l'étranger.


Chirurgiens diplômés cherchent emploi

Québec n'a aucun poste à offrir à des spécialistes formés à grands frais

http://www.ledevoir.com/societe/sante
Louise-Maude Rioux Soucy
18 mars 2010
 
C'est le monde à l'envers. Pendant que le ministre de la Santé et des Services sociaux, Yves Bolduc, met tous les maux du réseau de la santé sur le compte de la pénurie de personnel, trois jeunes chirurgiens cardiaques fraîchement diplômés n'arrivent pas à trouver de poste au Québec. Une situation tout à fait inhabituelle, qui risque fort de se répéter à l'identique dans d'autres spécialités si rien n'est fait pour repenser la planification des effectifs.

Ce n'est un secret pour personne que le temps opératoire est une denrée rationnée au Québec. Le phénomène s'est d'ailleurs accentué ces dernières années avec la pénurie de personnel infirmier et la fermeture de lits de soins critiques, cela de l'aveu même du ministère. Résultat: trois jeunes chirurgiens cardiaques sont forcés de rester sur la touche au moment même où un patient sur quatre n'est pas opéré dans les délais prescrits dans leur spécialité.

Ce cul-de-sac est vivement critiqué par la Fédération des médecins résidents du Québec (FMRQ) qui demande au ministère de la Santé de rebrasser ses cartes. Et vite, avant que ces trois recrues trouvent mieux ailleurs. «Pour maintenir ses compétences, un chirurgien cardiaque doit faire au moins 175 opérations par année. À l'heure actuelle, on ne leur en offre que le quart ou la moitié», raconte le président de la FMRQ, le Dr Yann Dazé.

La Fédération est d'autant plus étonnée par la timidité du geste que le besoin en chirurgie cardiaque est encore très important. Le mois dernier, l'Association des chirurgiens cardiovasculaires et thoraciques du Québec tirait d'ailleurs la sonnette d'alarme. Son président, le Dr Yves Langlois, révélait qu'environ 630 personnes attendent présentement l'intervention qui changera leur vie. Un chiffre élevé qu'il n'avait pas vu depuis longtemps dans sa spécialité.

Et pourtant, Québec n'a pas de postes à offrir dans cette discipline. La situation est tout à fait nouvelle pour la Fédération, qui en a saisi la Table de concertation permanente sur la planification de l'effectif médical. Le Dr Dazé espère une réponse rapide de la part du ministère. C'est que «beaucoup d'autres spécialités pourraient connaître des difficultés semblables à court ou moyen termes», spécialement la radio-oncologie et les chirurgies urologique ou générale, qui affichent déjà un taux de saturation élevé.

En chirurgie urologique par exemple, deux jeunes finissants n'ont pas su trouver une place à leur convenance cette année. «Il y a beaucoup de postes virtuels sur papier dans ce domaine. Mais sur le terrain, ce qu'on note, c'est que le besoin n'est tout simplement pas là», explique le Dr Dazé. Plutôt que de se tourner les pouces, les deux finissants laissés en plan ont décidé d'aller opérer en Ontario.

En radio-oncologie, le problème est quelque peu différent. En quelques années seulement, le Québec est passé d'une forte pénurie à l'abondance après avoir ouvert des places de résidence et recruté des professeurs à l'étranger. L'opération de charme a si bien fonctionné que les finissants ont aujourd'hui de plus en plus de mal à se trouver un poste.

«Ceux qui ont terminé cette année se sont trouvé un poste de peine et de misère, raconte le président de la FMRQ. L'an prochain, on peut présumer que ce sera plus difficile encore puisque leurs milieux sont déjà saturés. Il n'est donc pas dit qu'on ne se retrouvera pas en radio-oncologie avec le problème que nous connaissons aujourd'hui en chirurgie cardiaque.»

Le responsable des affaires médicales au ministère de la Santé, Michel Bureau, confirme que le Québec — qui affiche toujours un déficit de 800 spécialistes au compteur — a réussi à faire le plein dans certaines spécialités. «On ne manque pas de spécialistes dans tous les domaines», a-t-il confié à la radio de Radio-Canada, qui a levé le voile sur cette affaire hier.

Le Dr Bureau précise même qu'en chirurgie, certains spécialistes ne réclament plus de renforts, mais du temps pour opérer. Toujours à Radio-Canada, le Dr Bureau a convenu que les hôpitaux et le ministère devraient mieux informer les résidents des besoins réels pour les spécialités de pointe avant de les envoyer se spécialiser à l'étranger.

Mais attention, prévient toutefois le Dr Dazé, il ne faudrait pas noircir le portrait plus que nécessaire au point où plus personne ne voudra se tourner vers ces disciplines souvent saturées artificiellement par les pénuries de personnel et le manque de lits. «Nous avons affaire ici à un surplus temporaire. La Société canadienne de chirurgie cardiaque prévoit par exemple que d'ici 2020 à 2030, il pourrait y avoir entre 20 et 30 % des postes en chirurgies cardiaques qui seront vacants au Canada sur un total de 150.»