dimanche 27 novembre 2011

les italiens au Québec, constat !


Italophones en sol québécois - Un parcours cahoteux

Marco Micone, écrivain  16 novembre 2011
La notion même de communauté italienne devient de plus en plus inapplicable dans l’espace montréalais. Leur identité se décline désormais dans toutes les nuances du métissage. <br />
Photo : Pedro Ruiz - Le Devoir
 http://www.ledevoir.com/international/europe/336180/italophones-en-sol-quebecois-un-parcours-cahoteux
 
La notion même de communauté italienne devient de plus en plus inapplicable dans l’espace montréalais. Leur identité se décline désormais dans toutes les nuances du métissage.
    Né en Italie en 1945.
    Arrivé au Québec en 1958, Marco Micone est refusé par une école francophone et étudie d’abord en anglais: la lutte contre l’intolérance ethnique et linguistique sera un thème majeur de ses pièces de théâtre et poèmes, dont Speak What, écrit en réponse à Speak White de Michèle Lalonde.
    Dernie livre paru: Migrances suivi de Una Donna (VLB, 2005)

Il n'y a pas si longtemps, pendant que des noms à consonance italienne émaillaient des articles de journaux relatant des comportements peu édifiants, un vieil Italien, à qui j'ai demandé s'il croyait être intégré, m'a répondu: je suis intègre, cela devrait suffire. S'il est vrai qu'un quarteron de Québécois d'origine italienne est impliqué plus souvent qu'à son tour dans des activités qui contreviennent aux règles établies, il n'est pas moins vrai que la très grande majorité d'entre eux sont d'irréprochables citoyens.

Il n'est pourtant pas toujours flatteur d'être identifié comme Italien. À tel point qu'un italophone qui améliore son sort ou, pire encore, qui réussit à s'enrichir, surtout dans le domaine de la construction, est souvent soupçonné d'entretenir des liens avec la mafia. Cet amalgame, qui a cours depuis trop longtemps, s'ajoute aux rendez-vous manqués, aux conflits et aux inévitables préjugés qui ont jalonné le long parcours des italophones en sol québécois.

Les premiers Italiens s'installent véritablement à Montréal vers la fin du XIXe siècle. Ils sont environ 5000 en 1905, employés, pour la plupart, dans les mines, les chemins de fer et les camps de bûcherons. Beaucoup d'entre eux sont des hommes qui n'ont aucune intention de s'y établir. Ils comptent repartir aussitôt qu'ils auront économisé suffisamment d'argent pour acheter un lopin de terre ou pouvoir assurer une dot à leurs filles. Bon nombre sont illettrés. Mal payés et mal logés, ils vivent dans une malpropreté et une promiscuité dangereuses selon les journaux de l'époque. Méprisés et démunis, ils (dont mon grand-père) deviennent une proie facile pour de puissants agents d'emploi (une mafia qui exige une taxe d'embauche), dont le rôle est de fournir aux employeurs une main-d'oeuvre docile et bon marché. Du quasi-esclavage.

Culture mafieuse

Plus de dix millions d'Italiens émigrent alors (1890-1914) vers les deux Amériques. Beaucoup de ces immigrants proviennent des régions méridionales où, quelques années auparavant, d'ex-maquisards, soudoyés par de grands propriétaires terriens, avaient formé une milice dont la fonction était de réprimer les révoltes paysannes et de semer la terreur dans les campagnes. C'est ainsi que la mafia voit le jour. Au milieu d'une paysannerie indigente, ces mafiosi deviennent des personnages à la fois craints et admirés à tel point que l'expression fare la mafia est encore synonyme de se pavaner ou de faire le dandy. Cette culture mafieuse et le manque de civisme propre à des régions où l'État est honni ont depuis longtemps traversé l'Atlantique.

Il faudra attendre l'avènement du fascisme avec sa rhétorique cocardière et triomphaliste pour qu'enfin ces Méridionaux se réconcilient avec l'État italien, eux qui avaient toujours préféré s'identifier à leurs villages. La petite communauté italienne de Montréal subit, pendant près d'une décennie, la propagande fasciste jusque dans les églises et adhère, en bonne partie, à son discours moins par conviction politique que pour récolter les bienfaits psychologiques d'appartenir à une nation dont le Duce est adulé non seulement par le Vatican, mais aussi par des chefs d'État étrangers, dont Mackenzie King. La fête cessera brutalement lorsque l'Italie fasciste déclarera la guerre à la France. Des centaines d'Italiens vivant à Montréal seront alors arrêtés et emprisonnés à Petawawa.

Le parrainage

Lorsque l'immigration italienne reprend après la Deuxième Guerre mondiale, elle se caractérise par la politique du parrainage. Celle-ci permettra à 90 % des Italiens qui s'établiront au Québec entre 1947 et 1970 d'être parrainés par un membre de leur famille. [...] Ils élisent domicile pour la plupart à Montréal en même temps que des dizaines de milliers de Québécois provenant des régions. L'urbanisation s'intensifiant, on assiste ainsi à une longue période d'effervescence immobilière dont l'apothéose sera l'Expo 67. Parmi les italophones qui y trouvent du travail comme manoeuvres ou ouvriers spécialisés, quelques-uns deviennent entrepreneurs, parfois très prospères. Le pouvoir de l'argent ne pouvant faire fi du pouvoir politique et vice versa, la table est mise pour le meilleur et pour le pire. Il est faux cependant de croire, malgré la surmédiatisation de quelques individus, que l'industrie de la construction soit leur fief exclusif. Au recensement de 2001, il n'y avait que 6595 italophones (dont 860 femmes) dans ce secteur, représentant un peu plus de 5 % du total.

Pour une vie meilleure?

Je fais partie de cette vague d'immigrants des années 1950 qui a vu les pères émigrer avant le reste de la famille. La présence des enfants aurait coûté trop cher à la société d'accueil. Nos parents croyaient émigrer pour une vie meilleure. Elle a été tout au plus différente. Le dénuement faisant place à l'illusion d'abondance, chacun se contenta de son salaire de misère en attendant d'être vengé par ses enfants. Quant à moi, à peine sorti de l'enfance, j'étais bien là où j'étais né et la promesse d'être mieux ailleurs m'apparaissait comme un mensonge parmi tant d'autres. Je ne m'étais pas trompé.

Deux jours après mon arrivée, après avoir été refusé par une école francophone, je me fis traiter de moudzi Italien en montant dans l'autobus me conduisant à l'école-ghetto d'un quartier italien. Je compris longtemps après que cette invective recelait le germe de ma nouvelle identité. Il n'a pas toujours été facile, dans ce pays incertain, d'apprendre le français!

Conflits linguistiques

C'est par milliers que les Italiens arrivent au Québec pendant les années 1950 et 1960 dans la quasi-indifférence: aucune structure d'accueil n'existe ni pour les jeunes d'âge scolaire ni pour les adultes, sauf pour les hommes seuls. Pour eux, il y a la taverne où ils s'échangent les adresses des employeurs et des bordels. Dans les chaumières, on se scandalise de leur promiscuité, on se moque de la grosse Italienne habillée de noir et on n'attend pas que le taux de chômage monte pour les traiter de voleurs de jobs. («S'il était possible de voler des jobs, j'en aurais volé une meilleure», disait ma mère en revenant de l'usine).

Mais cela n'empêche ni les mariages interethniques ni la cohabitation dans les quartiers. Certains francophones accepteront même d'être les locataires de ces mangeurs de pâtes. En l'absence d'une loi imposant le français, ces nouveaux Québécois choisissent les écoles anglaises pour leurs enfants, tout à fait légalement. Personne ne s'en offusque pendant toute une génération. Puis, soudain, les francophones prennent conscience de la nécessité de franciser les immigrants. Deux légitimités s'affrontent, comme dans une tragédie, et c'est l'émeute à Saint-Léonard (1969). Dès lors, l'image des italophones hostiles aux revendications légitimes des francophones s'ajoute à la perception déjà peu flatteuse fondée sur la présence de la mafia et, à un moindre degré, sur les stéréotypes liés à leur origine paysanne, aux comportements traditionnels intrafamiliaux et aux italiâneries de quelques cuistres francophobes.

Notion de communauté

Avec la diversification de l'immigration à la fin des années 1970, les italophones quittent enfin l'avant-scène. Grâce à loi 101, ils pourront continuer à s'isoler dans les écoles anglophones. Il ne restera qu'eux, ou presque, à la Catholic School Board of Greater Montreal, jusqu'à son abolition. Ils pourront ainsi continuer à y apprendre l'anglais et le parler à leur manière, mais surtout à se créer un réseau d'amis qui leur ressemblent et qu'ils retrouveront dans leurs quartiers, pour le meilleur et parfois pour le pire. Est-il possible que le vivre-entre-soi ait contribué, dans certains cas, à la rétention de valeurs traditionnelles et à l'adoption de comportements singuliers?

Heureusement, cela ne les a pas empêchés d'apprendre le français. Au recensement de 2006, 91,8 % des italophones connaissaient le français, contre 73,7 % l'anglais. À la maison, pas plus de 37,7 % utilisaient l'anglais et 39,2 % le français. Quant à la langue de travail, le français l'emportait nettement: 55 %, contre 31,8 % pour l'anglais. Ah, si la loi 101 avait été votée 30 ans auparavant! C'est sur le plan de la scolarité que le tableau s'assombrit, car à peine 16,9 % d'entre eux détenaient un diplôme universitaire (parfois un simple certificat!), comme pour l'ensemble des Québécois d'ailleurs.

La loi 101, deux référendums perdus et 30 ans de débats ont transformé le Québec. Les représentations et les perceptions sont de moins en moins réductrices et stéréotypées. Elles correspondent davantage à la diversité générationnelle ainsi qu'à la complexité identitaire de chacun des groupes présents au Québec. Aucun n'a le monopole ni du crime ni de la vertu, et la mafia n'est plus un phénomène ni exogène ni mono-ethnique. La communauté italienne a, elle aussi, beaucoup évolué.

La notion même de communauté italienne devient de plus en plus inapplicable dans l'espace montréalais. Des 299 660 Québécois d'origine ethnique italienne (dont 42 % d'origine mixte), au recensement de 2006, 71,5 % étaient nés sur place, tandis que la très grande majorité des autres a immigré et vit au Québec depuis au moins 30 ans. Chacun a été façonné ici par son milieu de vie ou de travail. Leur identité se décline désormais dans toutes les nuances du métissage. Ni les mafiosi ni les hommes politiques ni les constructeurs n'en sont exclus.

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Marco Micone, écrivain

mercredi 16 novembre 2011

Enfin une bonne nouvelle...

Les pharmaciens auront plus de pouvoirs

Première publication 15 novembre 2011
Les pharmaciens auront plus de pouvoirs
Crédit photo : Archives Agence QMI
Par Jean-Luc Lavallée | Agence QMI
Les Québécois n'auront plus à faire la file chez le médecin, dans un proche avenir, pour de simples renouvellements de prescription. Ils pourront se rendre directement à la pharmacie.
Voilà un des impacts concrets du projet de loi 41, déposé mardi à l'Assemblée nationale par le ministre de la Santé, Yves Bolduc. Ce dernier souhaite réduire les délais pour les consultations à l'urgence et dans les cliniques médicales en accordant plus de pouvoirs aux pharmaciens. Le projet de loi résulte d'une «collaboration sans précédent» du Collège des médecins avec l'Ordre des pharmaciens, a-t-on souligné en point de presse.
«Des Québécois pourront voir leurs ordonnances renouvelées sans être obligés de retourner systématiquement à la salle d'attente des cliniques sans rendez-vous. La charge administrative des médecins et les piles de télécopies [...] diminueront enfin», a déclaré Diane Lamarre, de l'Ordre des pharmaciens. Les patients seront néanmoins les «grands gagnants» de cette réforme législative, puisqu'ils bénéficieront d'une «meilleure accessibilité» au système de santé, a-t-on clamé.
Quand la loi aura été modifiée, les pharmaciens pourront poser cinq actes supplémentaires: prolonger une ordonnance, ajuster une prescription, administrer certains médicaments (ex.: des gouttes dans les yeux ou une première dose d'insuline) afin d'enseigner l'usage approprié, prescrire des médicaments pour des conditions de santé mineures (ex.: allergies, feu sauvage, diarrhée du voyageur, infection urinaire), puis prescrire et interpréter des analyses en laboratoire (s'applique seulement aux pharmaciens oeuvrant dans un établissement de santé).
Réaction du PQ
«Ça fait longtemps qu'on est d'accord. Ça fait un an et demi qu'on le réclame, c'est dans notre programme. Ça va sûrement désengorger certains services de santé», a commenté la chef péquiste Pauline Marois.
Le PQ, à l'instar du gouvernement, veut que le projet de loi soit adopté avant Noël.
La péquiste Agnès Maltais craint toutefois que l'application de ces nouvelles mesures soit retardée. «C'est assez rare qu'il n'y ait pas de date dans un projet de loi, a-t-elle souligné. Il y a un flou qu'il va falloir corriger.»

Objectif: plus de 51 000 immigrants par année

Québec n'entend toutefois pas augmenter les budgets de francisation et d'intégration

Robert Dutrisac   2 novembre 2011
Québec — Le gouvernement Charest juge que le Québec peut accueillir un nombre élevé d'immigrants, soit entre 51 200 et 53 800 en 2012, sans pour autant consacrer davantage de ressources à leur francisation et à leur intégration.

C'est ce qu'a soutenu, hier, la ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles, Kathleen Weil, alors qu'elle présentait le plan d'immigration pour 2012 qui fait suite aux consultations sur la planification de l'immigration pour la période 2012-2015.

Il n'y a aucune nécessité d'augmenter les budgets consacrés à la francisation des immigrants, estime Kathleen Weil. «Je pense qu'on réussit bien au niveau de la francisation. On a des résultats, a-t-elle souligné. Les gens qui s'inscrivent ou qui veulent des cours de francisation, on répond à la demande.» Rappelons qu'en 2010, le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles (MICC) avait réduit de 5 millions les sommes allouées à la francisation des immigrants en se limitant à un budget annuel de 67 millions. Par ailleurs, environ 20 % des nouveaux arrivants qui ne connaissent pas le français ou le connaissent peu ne s'inscrivent pas aux cours dispensés par le MICC.

Intégration réussie

Nul besoin non plus de dépenser davantage pour l'intégration des immigrants puisque le gouvernement atteindra ses objectifs à ce chapitre. «Oui, absolument, absolument», a affirmé Kathleen Weil. «Ce n'est pas le ministère qui seul s'assure de l'intégration. [...] Emploi-Québec, c'est vraiment le ministère qui accompagne la personne jusqu'à l'emploi.» La ministre a signalé que les taux élevés de chômage chez les immigrants arrivés depuis cinq ans ou moins avaient légèrement diminué de 2009 à 2010 au Québec par rapport à l'Ontario et la Colombie-Britannique.

Kathleen Weil a indiqué que son gouvernement dépensait 300 millions annuellement pour l'immigration, soit davantage que les 260 millions qu'il reçoit du gouvernement fédéral en vertu de l'entente Ottawa-Québec. La ministre n'a toutefois pas mentionné qu'en plus, Québec perçoit quelque 35 millions par an des nouveaux arrivants pour la gestion de leur dossier.

Le Québec accueillera donc un maximum de près de 54 000 immigrants en 2012, soit l'équivalent du nombre record atteint en 2010. Ce nombre devrait diminuer graduellement à 50 000 d'ici 2015. L'immigration économique constituera 70 % des nouveaux arrivants, 5 % de plus que la moyenne des dernières années, et 65 % diront connaître le français, une légère progression.

Lors des consultations publiques plus tôt cette année, Kathleen Weil avait abandonné l'orientation du MICC de limiter à 30 % le nombre d'immigrants en provenance d'un seul continent, alors que 37 % des immigrants proviennent d'Afrique, principalement du Maghreb. «Il y avait tant de monde qui avait ce malaise parce qu'on ne veut pas donner une image du Québec qui est fermé à cette immigration», a-t-elle fait valoir. Or, en 2012, la part des immigrants en provenance d'Afrique chutera à 31 %. Mais il s'agit d'une variation ponctuelle, a-t-on expliqué au ministère. Plusieurs missions de sélection ont été annulées en raison du Printemps arabe et des troubles en Côte-d'Ivoire.