dimanche 31 janvier 2010

Impossible de voir un médecin

Noé Murchinson
Journal de Montréal
14/02/2008
Santé - Impossible de voir un médecin
La réceptionniste de la Clinique médicale Valmont, à Repentigny, nous a répondu sèchement qu’il fallait se présenter à 8 heures le lendemain. 
© Pierre-Paul Poulin - Le Journal de Montréal

Victimes de la mauvaise organisation des soins et du boom démographique qui frappe leurs villes, les résidants de la banlieue n’ont carrément pas accès à un médecin, certains jours de la semaine, dans les cliniques du réseau public. Pendant trois jours, une représentante du Journal de Montréal a tenté de voir un médecin à 82 reprises dans des cliniques sans rendez-vous de la région de Montréal. Alors que le rapport Castonguay sur la place du privé en santé est sur le point d’être publié, notre enquête a révélé que dans 60 % des cas, il était impossible de voir un médecin dans la journée.
Dans neuf villes situées dans les couronnes nord et sud, Le Journal de Montréal a même constaté qu’il n’y avait plus un seul rendez-vous disponible dès le début de la matinée.
À partir de 9h30 le matin, de nombreuses cliniques affichaient déjà complet et demandaient aux patients de revenir le lendemain, un phénomène qui accroît la clientèle des médecins ayant quitté le réseau public.
«Quand une personne qui a vraiment besoin de voir un médecin se fait dire d’attendre sans évaluation, il y a un danger évident», dénonce le président du Conseil pour la protection des malades, Paul Brunet.
Lundi et vendredi
Obtenir un rendez-vous d’urgence est aussi beaucoup plus difficile le lundi et le vendredi que le jeudi, a découvert Le Journal de Montréal pendant les trois jours de ce reportage.
«Souvent, les médecins vont concentrer leurs activités administratives ou leurs formations continues le vendredi», explique Jean Rodrigue, directeur des affaires médicales à l’Agence de la santé et des services sociaux de la Montérégie.
Pénurie de médecins
L’engorgement des cliniques est un phénomène bien connu des experts du réseau de la santé. «Il y a des cliniques où il faut arriver de bonne heure pour être soigné», confirme le docteur Raynald Pineault, médecin- conseil à l’Institut national de santé publique du Québec.
«Actuellement, il manque 800 médecins de famille au Québec, alors on arrive difficilement à répondre à tous les besoins», renchérit le docteur Jacques Ricard, porte- parole de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.
Raynald Pineault nuance toutefois l’impact de cette pénurie. «En général, il y a assez de médecins.
C’est plutôt l’organisation des services de première ligne qui fait la différence», dit le spécialiste.
Alors que la plupart des cliniques sur l’île de Montréal ont invité la journaliste à se présenter à leur service de sans rendezvous, voir un médecin s’est avéré presque impossible en banlieue.
«La population de la Montérégie a connu une croissance phénoménale, mais les nouveaux médecins n’ont pas suivi», dit M. Rodrigue, de l’Agence de la santé et des services sociaux de la Montérégie.
Montréal
Selon tous les spécialistes interrogés, le manque d’accessibilité à un médecin serait moins criant à Montréal parce qu’un nouveau type de cliniques, appelées cliniques- réseau et offrant du sans rendezvous 365 jours par année, y a été implanté depuis 2005.
La banlieue a quant à elle plus de groupes de médecine de famille, qui permettent de mieux suivre les patients, mais qui ne sont pas obligés d’offrir un service de sans rendez-vous aussi étendu que les cliniques-réseau.